Texte de la motion
Motion de défiance A. Petit @motion_de_defiance_a_petit@mobilizon.fr
Motion de défiance envers la présidence du CNRS
Nous, l'ensemble des agents (C, EC, IT, Doc, Pdoc, etc.) des laboratoires et UMR où le CNRS est tutelle, mais aussi l’ensemble de la communauté scientifique publique, inquiète de ce qu’une telle décision préfigurerait, exprimons notre plus vive inquiétude et notre opposition résolue aux orientations stratégiques récemment annoncées par M. Antoine Petit, président-directeur général du CNRS.
Ces orientations, notamment matérialisées par le projet des « Key Labs », constituent une remise en cause profonde de l'essence même de la recherche scientifique publique telle que le CNRS la défend depuis sa création. Les «Key Labs », en ciblant les financements et ressources sur quelques rares (25 %) laboratoires identifiés comme majeurs sur des critères inconnus, viennent accentuer la tendance préoccupante de l'intensification de la concurrence dans le monde de la recherche. Ce processus, largement engagé au fil des années de la mandature de M. Antoine Petit et totalement assumé et même prôné par lui, atteint cette fois un paroxysme pour nous insupportable.
En effet, ce projet :
Se dresse contre les principes fondamentaux de la liberté académique, en oubliant l'importance de conjuguer toutes les thématiques, qu'elles soient orientées par des intérêts économiques à moyen et court terme ou qu'elles s'inscrivent dans de la recherche fondamentale, exploratoire et désintéressée qui ne peut s'inscrire que sur un temps long ;
Renforce des inégalités territoriales et disciplinaires en concentrant les financements et les ressources sur quelques laboratoires jugés « stratégiques », au détriment de l'écosystème scientifique global et en mettant ainsi à son ban la plus grande partie (75 %) de ses laboratoires et personnels ;
Fragilise le statut des chercheuses et chercheurs et des ITA en favorisant des modèles de financement précaires et ponctuels, au lieu d'un soutien durable et structurant ;
S’inscrit en contradiction avec la réforme de l’évaluation scientifique qui vise à mettre en place des critères plus qualitatifs et à intégrer les enjeux environnementaux ;
S’impose de la manière la plus brutale qui soit aux autres tutelles des Unités Mixtes de Recherche (UMR) qui composent elles-mêmes l’essentiel du paysage de la recherche française ;
Ne fait l'objet d'aucune concertation transparente avec la communauté scientifique, rompant ainsi avec les valeurs de collégialité et de démocratie scientifique qui devraient présider à toute évolution majeure au sein de notre institution.
Face à ces dérives, nous estimons que M. Antoine Petit a failli à sa responsabilité de garantir un pilotage de l'organisme respectueux de sa mission première : le développement de connaissances au service de la société, dans un cadre public et autonome. Alors que l’urgence devrait être de faire en sorte que la France parvienne enfin à financer correctement sa recherche publique comme elle le devrait eu égard à ses engagements européens, ce projet ne pourra qu’entraîner la destruction même de tout ou partie du CNRS, organisme irremplaçable que nous envient nombre de pays, européens ou non.
Nous réaffirmons que les transformations actuelles sont incompatibles avec les valeurs de la recherche publique et appelons :
À un arrêt immédiat du projet des « Key Labs » et à une révision de l'ensemble des orientations stratégiques récentes du CNRS ;
À une réforme en profondeur de la gouvernance du CNRS, incluant l'ensemble des personnels qui, pour la plupart, s'impliquent sans compter dans les différentes instances assurant la bonne marche de l'organisme, mais qui sont totalement ignorés, voire méprisés dans le mode de fonctionnement actuel ;
À la démission de M. Antoine Petit pour permettre une refondation collective de notre institution sur des bases conformes à ses missions fondamentales.
Nous invitons l'ensemble des laboratoires, instances scientifiques et collectifs à soutenir cette motion et à se mobiliser pour défendre une recherche publique, libre et indépendante.
Le 10 janvier 2025